Parentalité désigne l’ensemble des façons d’être et de vivre le fait d’être parent. C’est un processus qui conjugue les différentes dimensions de la fonction parentale, matérielle, psychologique, morale, culturelle, sociale (définition du Comité National du soutien à la parentalité)
Fin mars dernier, parents, équipes et amis des Maisons des Familles en région Sud-Est se sont retrouvés à Marseille autour de chercheurs et de partenaires invités pour une journée d’étude, deuxième d’une série de cinq, sur le thème “La confiance, une dynamique nécessaire dans le soutien à la parentalité ?”.
Quartiers nord de Marseille, 21 mars, 9h30. Dans la grande salle du Cloître, ce pôle d’entreprenariat social récemment monté par Apprentis d’Auteuil en Provence-Alpes-Côte d’Azur, les invités commencent à affluer. Familles, professionnels de la fondation ou d’associations proches, partenaires sociaux, fonctionnaires territoriaux, tous sont heureux de découvrir plus en détail les principes d’action à l’œuvre dans nos Maisons des Familles.
Table ronde et ateliers
Au programme de la journée, le matin, des va-et-vient entre les équipes, les parents et des chercheuses, avec en fil rouge, un rapport “Avec les parents, faire grandir les enfants”, rédigé en 2021 par la MRIE, une association rhône-alpine d’information sur l’exclusion, pour expliquer la pédagogie à l’œuvre dans ces lieux atypiques. L’après-midi, des ateliers pratiques sur le thème de la confiance.
« À cause de la pandémie, explique Elisabeth Michel, chargée de projet à l’origine de la journée, nous n’avions pas eu l’occasion de faire connaître le rapport de la MRIE. Il nous semblait intéressant de le présenter à un maximum de personnes, en lien avec l’expertise de chercheurs et de partenaires invités, travaillant, comme nous, avec des familles en situation de précarité sur Marseille et la région. »
Sylvie Davieau, directrice de La Halte des Parents (Marseille 13), complète : « Nous avons bâti l’ensemble de ces journées selon le principe collaboratif qui nous anime depuis toujours. Dans nos Maisons, tout est un peu en mode projet, il y a en nous cette volonté de favoriser le pouvoir d’agir des personnes. »
L’ opportunité du Plan Pauvreté
10h. Après le mot d’accueil de Jeane Tellier et de Sylvie Davieau, les deux directrices des Maisons des Familles marseillaises, Laurence Potié, auteure du rapport de la MRIE, présente le document en commençant par évoquer les conditions dans lesquelles il a été rédigé : « Fin 2018, l’État annonce un plan pauvreté, qui porte entre autres sur les questions de la petite enfance et du travail social. Les directrices des Maisons des Familles du Sud-Est, qui se réunissent entre elles depuis longtemps, saisissent l’opportunité offerte. Pour elles, les Maisons des Familles ont quelque chose à dire de leur savoir-faire à la société. Pourquoi ne pas demander à la MRIE de les aider à mettre des mots sur leur expertise ? »
Des parents sur les planches
Pour Laurence Potié, un des points forts des Maisons des Familles réside dans leur visée première : sécuriser les parents qui frappent à leurs portes. Autres atouts de leur pédagogie selon elle, le fait que ces lieux accueillent les parents et les enfants en même temps et la place accordée à la dimension affective dans leur travail.
11h 15. Pause artistique. Sur le plateau transformé en scène, une dizaine de parents-comédiens s’apprêtent à monter, pour la plupart pour la première fois, sur les planches. L’écriture de leur spectacle – sur le thème de la confiance s’est voulue dès l’origine participative, plusieurs ateliers leur ayant permis de partager leurs idées autour de Pascale Karamazov, comédienne et animatrice d’ateliers.
Précarité et confiance
11h 30, place à une table ronde, menée par Elisabeth Michel, entre parents, chercheurs et partenaires invités. Hairiya Bancel et Kamla Sadoki, deux mamans marseillaises, plantent le décor : « C’est difficile de faire confiance, lancent-elles d’emblée. Avec les travailleurs sociaux d’abord, quand on a des démarches administratives à faire. On peut être aussi trahi par un conjoint ou avoir du mal à vivre la confiance avec un adolescent. Il faut apprendre à faire confiance. Sinon, nos vies peuvent vite devenir très compliquées… »
Marielle Coiplet, représentant Joëlle Chenet, commissaire à la lutte contre la pauvreté en Provence-Alpes-Côte d’Azur, salue alors le travail de confiance entre partenaires que constitue, selon elle, le projet des Maisons des Familles : « De votre programme, je retiendrai la volonté permanente que vous avez de vous améliorer, la nature de la relation à l’œuvre dans vos lieux d’accueil et l’alliance qui se construit progressivement entre les équipes et les familles. La confiance ne se décrète pas ! »
Le temps d’échange se poursuit avec Clotilde O’Deyé, anthropologue, animatrice d’ateliers et auteure d’un guide pratique (1). La formatrice interpelle l’ensemble des professionnels présents sur leur manière d’être en relation avec les familles, pour renforcer leur confiance et instaurer avec elles une relation plus ouverte : « Les parents que vous côtoyez savent plutôt bien s’y prendre en matière de parentalité, insiste-t-elle. Leur problème, ce sont leurs conditions extérieures de travail, de logement, voire d’insalubrité pour certains, qui les freine au quotidien. Il faut d’autant plus en tenir compte en continuant à poser sur eux un regard neuf et en acceptant votre propre vulnérabilité. »
14h. Ateliers pratiques. Réparti en différents groupes animés par des parents formés à l’animation de groupe, le public invité échange sur la confiance : confiance et transmission, confiance dans la famille, confiance et diversité, confiance et estime de soi… Partout dans la salle, les langues se délient, les confidences fusent. L’écoute est au rendez-vous, l’émotion palpable.
Apprendre à croire en soi
15h 30, la journée s’achève. « Ce qui est bien avec ce temps fort d’aujourd’hui, c’est qu’on a pu dire ce qu’on avait sur le cœur, commente Yamna Tellal, mère de trois enfants âgés de 10, 12 et 15 ans. La confiance, c’est la base ! J’en avais déjà, mais depuis que je fréquente la Halte et son ambiance si chaleureuse, elle a décuplé. Du coup, mes enfants en profitent. On parle plus entre nous. Ma vie a vraiment changé ! » Même enthousiasme chez Raymonde Thomas, bénévole à la Maison des Familles de Chambéry. « La pédagogie déployée dans les Maisons des Familles est une vraie perle ! Quant à la confiance, elle nous concerne tous, parents, professionnels, bénévoles. J’ai beaucoup appris de ces échanges et j’en sors grandie. »
Pour tous, la journée aura été un vrai succès. « J‘ai du mal à trouver les mots, tout s’est passé tellement vite, conclut Rachid Amraoui, éducateur à la Halte. Ce qu’on a vécu aujourd’hui, c’est de l’or en barre. Beaucoup de parents ont osé s’exprimer. Ils ont su croire en eux. C’est magnifique ! »
A suivre…en Rhône-Alpes
Plusieurs autres rendez-vous vont avoir lieu
- “Le collectif : Ensemble, apprendre à grandir” – 17 mai 2022
Maison des Familles du Bassin Chambérien. Contact Lucie Ramognino 06 18 39 95 94 - “Sécuriser “dedans” pour aller dehors” : une étape nécessaire comme parent et citoyen” – 2 juin 2022
Maison des Familles de Grenoble. Contact Sophia Dlimi 06 62 19 99 15 - “Ta parole est précieuse, le sais-tu ?” – 21 juin 2022
Maison des Familles de Vaulx-en-Velin & Villeurbanne. Contact Noémie Thiesson 06 68 64 59 35
(1) « Accompagner la parentalité en exil, analyse et guide pratique à l’usage des intervenants », éd. Presses de l’EHESP